Tourisme et communication responsable : même combat !

Publié le 18 octobre 2023
4 min

Le titre de cet article est quasiment le même que celui d’un précédent billet. Car cette idée, exprimée ici il y deux ans, s’est révélée très concrète lors des dernières rencontres nationales du etourisme. Les trois journées paloises les plus attendues de l’année ont vu s’enchainer sur scène des retours d’expérience sur les sujets de la transition du tourisme, des nouveaux imaginaires et d’une communication touristique à la hauteur des enjeux de notre époque. 

La promotion touristique a longtemps nourri un certain imaginaire, mettant en scène des voyageurs stéréotypés dans des paysages idéalisés. Non sans conséquences sur les pratiques touristiques et leurs externalités négatives. Cette prise de conscience n’est pas nouvelle mais nous peinons collectivement à engager une véritable transition sur ces sujets. Pourquoi une telle inertie ? Probablement parce que changer le logiciel de pensée prend du temps (Clément Simonneau – Transitions), à l’image d’une société en mouvement mais contrainte de jongler avec ses paradoxes (Jean-Baptiste Soubaigné – Paradoxes). 

Cette nécessité de changer, par souhait ou par contrainte, s’est révélée très concrètes dans plusieurs interventions. N’ayant pas encore eu le temps de visionner 100% des replay (le programme était tellement riche cette année!), je ne me lancerai pas dans un exercice de synthèse. D’autant plus que Jean-Luc a posé la première pierre d’un triptyque, Laurence Giuliani et Jean-Baptiste Soubaigné prendront le relais dans les jours à venir. Pour ma part, je souhaitais revenir sur deux ateliers que j’ai eu le plaisir d’animer. 

L’efficience du collectif en Nouvelle-Aquitaine 

L’expérience des séjours bas-carbone en Nouvelle-Aquitaine fera des émules. Depuis deux ans, une multitude d’acteurs travaillent ensemble pour proposer de manière très concrète des alternatives moins émettrices de CO2 pour voyager en Nouvelle-Aquitaine. 80% de la clientèle de la région vient via des mobilités à fort impact carbone, soit en voiture et en avion. C’est donc là que doit s’opérer la bascule afin d’agir très concrètement sur le sujet du dérèglement climatique. Pour faire bouger les lignes, une démarche collective a été lancée unissant les forces du CRT Nouvelle-Aquitaine, de l’ADT64, des Offices de Tourisme du Pays-Basque mais aussi de partenaires privés comme les voyagistes Terres d’Aventure ou Respyrénées. 

Eviter, réduire, compenser 

Pour agir sur les émissions de CO2, encore faut-il connaitre avec précision leurs origines. Fort de ce constat, le CRT NA a porté avec l’ADEME un projet de calculateur carbone des émissions de CO2 à un niveau territorial. Il s’appuie sur différentes datas permettant de croiser les impacts carbones et économiques des clientèles selon leur provenance. Une ressource d’aide à la décision unique en France, que les équipes du CRT NA mettent à disposition de ses partenaires locaux. La méthode est aussi disponible pour toutes les régions qui souhaiterait se l’approprier, même si elle se retrouve confrontée à une problématique de resources des données. 

Du côté de l’ADT64, on a fait le choix de croiser l’apport économique des clientèles avec leurs émissions de CO2, et de prioriser les actions en conséquence. En résulte une matrice et un plan marketing très pragmatique. 

Matrice de l’ADT64

Cette collaboration entre les différents acteurs a aussi permis la production d’une vingtaine de séjours « bas carbone », la plupart commercialisés par les partenaires privés. Ces séjours sont aussi de formidables objets de communication, largement diffusés pour porter ce nouvel imaginaire du voyage en Nouvelle-Aquitaine, au Pays-Basque. Là-encore, la collaboration entre les différents acteurs a permis une diffusion efficiente et pleine de sens. L’objectif retenu n’étant pas la visibilité des structures mais bien celle de ces séjours et de ce nouveau récit territorial. 

Dispositif de diffusion des séjours bas-carbone sur les réseaux sociaux

Je vous invite à visionner en replay cet atelier dans lequel Amandine Southon et Emilie Roy détaillent l’ensemble du dispositif : 

La communication responsable commence par les actions de terrain, au risque d’un retour de bâton qui pourrait s’avérer particulièrement violent. Dans cet exemple, on fait les choses dans l’ordre. Et ce nouveau récit devient alors audible pour les clientèles. 

Les OGD doivent-elles être des structures militantes ?  

La communication responsable n’est pas qu’une question de carbone, ni seulement de protection de l’environnement. Le sujet de l’inclusivité doit aussi être pris a bras le corps. C’était tout l’objet d’un second atelier dans lequel nous nous sommes questionnés sur le rôle que doivent tenir par les OGD. Quelle est aujourd’hui la place des diversités culturelles, sociales, sexuelles, ethniques dans la communication touristique ? Finalement, est-ce aux OGD de porter ses sujets ? Avec quelle part de risque ? Nous avons tenté, avec Aurélie Loubes et Camille Ract, de répondre à ces questionnements, mais aussi et surtout de poser une bonne fois pour toute le sujet sur la table. S’il reste encore beaucoup de chemins à parcourir, les témoignages de cet atelier nous montre le champ de possible. Mais aussi ses difficultés. Je remercie une fois de plus Loïc Granzini pour son témoignage vidéo diffusé en fin d’atelier qui nous a touché.    

Le cercle vertueux de la communication 

Communiquer sans action de terrain s’apparente à du green / social washing. Mais communiquer sert aussi a impulser une dynamique. Ne négligeons pas notre capacité d’influence, notamment grâce aux dispositifs digitaux. Nous portons collectivement des centaines de millions de messages (700 millions de messages diffusés par an juste à l’échelle de mes équipes !). La communication touristique a la capacité d’agir sur la demande en portant un nouveau récit, en montrant des alternatives concrètes. Elle a aussi la capacité d’influencer l’offre. En sur-valorisant les acteurs les plus engagés, on donne un signal fort et démontre le champ des possibles. 

La destination touristique durable n’existe pas, elle n’existera jamais. La durabilité est une utopie. On peut par contre agir en responsabilité.  

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Sébastien est cofondateur du projet KAIRN , société a mission qui fait le lien entre numérique responsable et tourisme responsable. Il est aussi directeur de my destination, agence de communication numérique et engagée. Leur crédo : placer les réseaux sociaux au service des stratégies touristiques.
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