Open data : ouvrez, ouvrez la cage aux infos !

Publié le 22 juillet 2011
6 min

Open data, littéralement « donnée ouverte ».
La « définition donnée par Wikipedia »:http://fr.wikipedia.org/wiki/Open_data est la suivante : _ »Information publique brute qui a vocation à être librement accessible. La philosophie pratique de l’open data préconise une libre disponibilité pour tous, sans restriction de copyrights, brevets ou d’autres mécanismes de contrôle »_.
La première phrase contient les mots essentiels : *publique, librement accessible*. La seconde est sujette à débat.

En matière de E-Tourisme, la question que nous devons nous poser est : *les informations touristiques saisies par les acteurs publics, notamment dans le cadre des Systèmes d’Information Touristiques (SIT) relèvent-elles, potentiellement de l’Open Data ?*
Oui, à l’évidence : il s’agit de données publiques et elles ont vocation à être librement accessibles.
Cette « compatibilité Open Data » est confortée par une loi, encore peu connue dans le monde du tourisme mais qui mérite cependant que l’on s’y intéresse.

Il s’agit de la loi dite CADA, du nom de « la Commission d’Accès aux Documents Administratifs »:http://www.cada.fr/fr/presentation/frame.htm.
Cette loi du 17 juillet 1978 est relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et et à la réutilisation des informations publiques. Vous trouverez le « texte original sur le site de Légifrance »:http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068643&dateTexte=vig.

Ce qui doit retenir le plus notre attention *c’est l’article 10, dans le chapitre 2*.
En substance : _ »Les informations figurant dans des documents produits ou reçus par (l’Etat, les collectivités territoriales, ainsi que les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission), quel que soit le support, peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite, à d’autres fins que que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus. »_
Il y a des conditions de réutilisation (comme la non altération des informations par exemple), mais le principe de liberté est affirmé de manière nette.
Par ailleurs, la possibilité de licences ou, selon les termes de la loi, de redevances, est prévue. C’est un point fondamental, dont nous n’avons pas fini d’entendre parler, selon moi, notamment en regard des débats en cours au niveau européen sur la copie privée et, plus largement, sur la rémunération de la propriété intellectuelle.

Avec le développement de la dématérialisation des données publiques, un mouvement en faveur de l’Open Data s’est fait jour en France, à la suite des Etats-Unis et du Royaume Uni, à travers des initiatives isolées, de villes comme « Rennes »:http://www.data.rennes-metropole.fr/notre-demarche/l-open-data-c-est-quoi/ et « Paris, avec son site ParisData »:http://opendata.paris.fr/opendata/jsp/site/Portal.jsp, par exemple.

La Fondation Internet Nouvelle Génération (« la FING »:http://fing.org/) a lancé en 2010, « une campagne en faveur de l’Open Data »:http://fing.org/?Une-campagne-autour-de-l-OpenData.

Sous cette impulsion, entre autres, plusieurs collectivités françaises commencent progressivement à ouvrir leurs données.
La Communauté Urbaine de Bordeaux (CUB) en est une illustration intéressante, que je vous laisse le soin d’aller consulter « directement sur le site de la CUB »:http://www.lacub.fr/grands-projets/reutilisation-des-donnees-publiques.
En résumé : il y a des données publiques, on les partage gratuitement, *avec comme objectif de favoriser le développement de services utiles aux citoyens*.

*C’est la clé de mon article : le développement de nouveaux services utiles aux touristes passe par l’ouverture de l’information touristique publique.*

C’est à cette condition que la mission des Offices de Tourisme, CDT, CRT mais aussi Parcs Nationaux, Parcs Naturels Régionaux, Communautés de Communes, Pays d’Accueil… renforcera sa légitimité en tant que mission de production d’information d’intérêt public.
Qui plus est, il y a un marché. La loi CADA, je le rappelle, prévoit la possibilité de redevances. Donc, il est envisageable de valoriser l’accès à l’info touristique.

Mais nous avons quelques problèmes avant de pouvoir nous engager dans cette direction…

SIT et Open data : on fait quoi ?

L’Open Data rencontre des obstacles liés à l’organisation des SIT :

# *Problèmes d’accessibilité* : la qualité de l’info est excellente, mais les flux sont perfectibles. Il y a trop de champs, trop d’interlocuteurs, trop d’hétérogénéité au sein même des bordereaux, trop d’éclatement administratif. Il est aujourd’hui quasi impossible d’organiser un service à l’échelle de la destination France à base de flux publics. Chaque département a sa propre logique (ou pas de logique du tout) et l’accessibilité aux données peut, finalement, être qualifiée de médiocre.
C’est un vrai souci car les opérateurs privés souhaitant proposer des services e-touristiques sont légion et ils finissent tous par puiser leurs infos sur le Web, à la volée. La raison en est que l’on ne peut rentabiliser un service (une application, un site…) qu’à l’échelle nationale, minimum.
# *Des données stratégiques sous valorisées* : je vois trois stocks de valeur.
Le listing des hébergements, mais il est en perte de vitesse car fortement concurrencé par Google Adresses et les annuaires. Il faudra bien, un jour ou l’autre, arrêter de créer un champ tous les matins pour faire plaisir à tel ou tel loueur de meublé ! et démotiver ainsi les développeurs, obligés de retoucher sans cesse leur code !
Les fêtes et manifs : crucial, et tellement mal organisé (un coup j’ai un titre de manif, un coup j’ai une date, un coup j’ai un nom d’association… et bonjour la gestion des flux RSS). Les fêtes et manifs doivent être mieux traitées au plan éditorial. Les OT dorment sur une poule aux oeufs d’or, dommage.
Les disponibilités : stratégique, surtout dans un contexte de réservations en UDM (Ultra Dernière Minute). Mais cela suppose une organisation territoriale extrêmement rigoureuse.
Les autres données : traces GPS, fonds documentaires patrimoniaux… Chaque destination dispose d’infos spécifiques à forte valeur ajoutée.
# *La question des serveurs* : les collectivités préfèrent toujours financer de l’investissement plutôt que du fonctionnement. C’est un principe de gestion plutôt sain, mais il y a quand même un minimum à assurer. En l’occurrence, il faut se payer des bons serveurs. Or, ce n’est pas toujours le cas pour les SIT. Alors petit à petit, on laisse tomber la logique de web service, pour aller vers les fameux exports nocturnes. Certes ça n’empêche pas l’Open Data, mais vous imaginez Google en train de vous proposer de faire des imports nocturnes pour éviter que son service Adresses ne rame ? Absurde pas vrai ? Et bien, plusieurs SIT en France fonctionnent comme cela. La question est : pour combien de temps ?

En conclusion, je milite pour l’Open Data touristique, parce que cela signifie de nouvelles opportunités pour tous, touristes compris.
Et j’estime que pour y parvenir, il faut engager un chantier assez conséquent :

* *Harmonisation et simplification des bordereaux, des procédures de saisie et de la mise à disposition des flux, à l’échelle nationale* : oui, ça s’appelle une normalisation (et pas simplement un format de données). Oui elle doit être contraignante et limitative (en ce sens qu’il ne doit pas être question d’ajouter sans cesse des nouveaux champs pour faire plaisir au dernier qui a parlé). Oui ça représente un investissement significatif.
* *Généralisation d’un schéma de gouvernance des SIT*, quelle que soit leur nature, avec un organigramme fonctionnel (qui fait quoi ?), des règles d’information claires et responsables, des référents locaux mieux identifiés et valorisés dans leur rôle.

Parmi les régions que je connais, j’en vois trois qui, à titre ou un autre, pourraient être prises comme modèles : Rhône-Alpes en premier lieu, avec SITRA, puis la Wallonie avec PIVOT et le Limousin avec son LEI.

Mais peut-être que je suis à côté de la plaque ? Ou que je fais resurgir de vieux fantômes ?
Qu’en pensez-vous ?

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Pierre Croizet est né en 1970, à Issoire. Il vit et travaille à Bordeaux depuis 1998. Il est diplômé de l’Institut des Hautes Etudes de Droit Rural et d’Economie Agricole (IHEDREA – Paris) et du DESS Aménagement du Territoire et Economie du Développement Local (Bordeaux IV – IERSO). Il a créé, en 2004, avec Benjamin Bastien, une des premières maisons d’édition électroniques de France, spécialisée dans les guides touristiques et [...]
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