Transformation digitale : des essais loin d’être transformés

Publié le 11 octobre 2017
4 min

Dans son poème Art poétique, Nicolas Boileau écrivait en 1674 ce qui pourrait être le mantra de ce blog où chacun d’entre-nous apporte chaque jour sa (modeste) pierre à l’édifice afin de faire tomber les à-priori, ouvrir les consciences, partager des expériences ou des outils sur le digital:

« Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :
Polissez-le sans cesse et le repolissez »

Le constat que je vais vous partager aujourd’hui complète la publication la semaine dernière d’une étude menée par Bpifrance qui s’intitule Histoire d’incompréhension : Les dirigeants de PME et ETI face au digital.

Les résultats de cette enquête permettent de battre en brèche certaines idées reçues. La plus étonnante est que « 87 % des dirigeants de PME et d’ETI françaises n’affichent pas la transformation digitale comme une priorité stratégique pour leur entreprise. »

Lorsque l’on a la tête dans le guidon du numérique, que l’on baigne dedans au quotidien, on aurait tendance à penser que la majorité des entreprises a fini par prendre le train en route même si les actions sont infimes. Différents freins sont identifiés dans cette trop lente prise de conscience.

Je vous invite évidemment à lire l’ensemble de l’étude et peut-être ferez-vous comme moi le constat que la situation n’est pas bien différente dans nos EPCI et nos élus ne sont pas différents des dirigeants d’entreprise.

Il y a en effet un frein qui n’est pas clairement identifié dans ce rapport où du moins pas assez à mon sens, malgré une jolie formule dans l’édito : « Les clients roulent en Ferrari sur smartphone en 4G alors que le stock est encore géré au code barre charrette à bras […] cette révolution est invisible : qui a déjà vu les serveurs des géants de l’internet ? » Ce frein qui régit les quatre autres cités plus haut, c’est la méconnaissance du client ou de l’administré suivant que l’on est chef d’entreprise ou élu; méconnaissance voire aveuglement face aux nouvelles pratiques. Mais peut-on encore parler de nouvelles pratiques en 2017. Vous avez sans doute vu passer ce post sur Facebook ces derniers jours : Quel mot est né la même année que vous? J’ai retenu que smartphone avait déjà 24 ans!

Je vous fais part d’une petite anecdote. Dans le cours de ma recherche d’emploi, afin de répondre à certaines problématiques territoriales je me suis emparé des questions d’e-gouvernance. Afin de corroborer mes dires, il me fallait des chiffres pour accompagner mon argumentaire. Car la méconnaissance et l’aveuglement, nous les croisons tous les jours : ils se cristallisent dans le fameux « Non mais nous, notre situation est différente. [le numérique] ce n’est pas pour nous ».

À la question Consultez-vous l’information de votre intercommunalité? les réponses sont : non à 50%, sur bulletin papier à 17%, sur internet à 17%, sur les deux médias à 17%.

Plus loin je demandais Seriez-vous prêt à utiliser un réseau social que vous n’utilisez pas encore pour échanger de manière plus directe avec les services intercommunaux (social, voirie, santé, développement économique, culture, etc.)? 85% répondent oui, 15% répondent non.

Je retiens deux leçons de cette expérience. La première *spoiler alert* la présentation des résultats n’a pas reçu d’écho favorable * fin du spoiler*; la deuxième : si quelqu’un est intéressé pour voir avec moi la méthodologie du questionnaire (à découvrir en suivant ce lien), nous pourrions le diffuser sur une plus large échelle et obtenir des résultats plus fin sur un échantillon conséquent.

Mon propos peut paraître éloigné de nos préoccupations touristiques (oui, vous êtes toujours sur etourisme.info) et pourtant. On ne prêche pas dans le désert bien longtemps. L’animation numérique de territoire est une niche aujourd’hui dans les collectivités territoriales. À rester dans cette niche, elle risque la relégation au rang de « gadget nécessaire » pour les élus au moment de trancher les budgets. Guillaume Cromer évoquait hier ces questions de gouvernance en vous parlant de l’état-plateforme. Je suis convaincu que notre discours sera entendu en y prenant pleinement part. Nous avons tout à gagner à engager des actions en ce sens. D’une part le tourisme est déjà moteur sur ces questions de transformation digitale, d’autre part c’est une manière de rendre visible et faire adhérer et participer les citoyens aux projets touristiques des territoires.

Pour finir, je vous partage encore deux petites choses sur ce thème. Si vous ne connaissez pas le site, allez faire un tour sur https://ogptoolbox.org/fr/ (OGP pour Open Government Partnership, soit le Partenariat pour un Gouvernement Ouvert). Le site recense un ensemble d’outils numériques et des exemples d’usages d’e-gouvernance à travers le monde (consultation citoyenne, gestion de projets participatifs, etc.).

Et pour être plus concret, voici un reportage (5mn) vu il y a plus d’un an sur Arte.

Pour conclure, la route est longue. Mais continuons à enfoncer le même clou. Le mur finira par tomber. Et ayant achevé récemment un CDD, vous pouvez faire passer le mot que je suis disponible pour en discuter très librement avec toute personne en phase de recrutement sur cette thématique.

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Historien de formation, c'est par une spécialisation en valorisation des patrimoines naturels et culturels que Jérôme a mis un pied dans le tourisme. Il met sa passion des territoires au service de leur promotion. Jérôme a notamment travaillé dans les Offices de Tourisme de Poitiers, Aurillac et Villeneuve-sur-Lot. Toujours à l'affût d'outils pour entraîner ses collègues dans des approches innovantes, c'est un geek curieux d'apprendre et transmettre. Mise en œuvre [...]
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