Le voyage du futur a-t-il un avenir ?

Publié le 22 avril 2014
4 min

skyscanner1Où toutes les tendances que ce blog essaie de repérer et décortiquer pour vous nous mènent-elles ? Comment voyagerons-nous dans le futur ? Voilà la question fondamentale pour anticiper l’évolution des comportements et des attentes des touristes, et nous préparer à mieux les accueillir.

Skyscanner, le comparateur de vols se l’est posée et a tenté d’y répondre avec une approche très large croisant de nombreux domaines grâce aux 56 experts interrogés. Voilà une entreprise ambitieuse dont la première partie, portant sur la préparation et la réservation, fait l’objet d’un rapport sorti le 8 avril dernier.
Comme beaucoup d’entre vous sans doute, j’ai pu lire ce rapport intitulé « L’avenir du voyage 2024 ». Vous le trouverez en ligne sur un site dédié très sympa, et aussi dans sa version pdf « classique ».

Comme il est écrit dans la note méthodolgique, « Ce rapport Skyscanner est le fruit du travail d’une équipe de 56 personnes (éditeurs, chercheurs et spécialistes des réseaux du futur) dans des villes internationales clés pour dresser un tableau détaillé des technologies révolutionnaires des dix prochaines années et des nouvelles destinations originales qui transformeront le secteur mondial du voyage dans les années 2020. 
Nous avons analysé les technologies futures et les nouveaux comportements dans le secteur du voyage en nous mettant à l’écoute du savoir-faire d’un certain nombre d’experts renommés, comme le futurologue Daniel Burrus, auteur de Technotrends: How to Use Technology to Go Beyond Your Competition et le futurologue des voyages Dr Ian Yeoman. »

 

En parcourant ce document vous verrez effectivement comment les technologies à l’état émergent actuellement pourraient s’épanouir dans le domaine de la préparation du voyage :

  • une nouvelle interface avec la puissance informatique comme un véritable « compagnon numérique intelligent » combinaison de Google Glass, d’objets connectés, d’interactions permanentes avec les réseaux, et  qui jetteront aux oubliettes nos antiques claviers, voire même nos doigts ! 😉
  • la réalité augmentée pour découvrir, sentir, tester même les destinations projetées avec une précisions, une « réalité » de plus en plus parfaite ;
  • la recherche sémantique pour prédire les réponses les plus pertinentes et les plus personnalisées grâce à l’analyse permanente des fameuses big data…

Cet exercice très fouillé imagine avec brio comment chaque avancée technologique va pouvoir influer sur notre manière d’envisager nos futurs voyages. Tout ceci paraît presque rassurant pour nous autres férus de ces nouveaux outils. Néanmoins, une première critique « endogène » peut déjà être formulée autour de deux axes, sans prétendre à l’exhaustivité :

  • La maturité numérique nécessaire pour maîtriser ces outils de plus en plus omniscients constituera sans aucun doute une fracture majeure entre une « élite » numérique  toujours plus pointue et la cible grand public qui est celle des voyageurs. Bien sûr les usages se répandent mais négliger ce type d’objection conduit souvent à des impasses. La clé sera de valoriser les bénéfices d’usage pour le client avant la prouesse technologique…
  • Les inégalités dans l’accès au numérique reste désespérément patente ! Le marché du voyage va progresser de manière forte nous dit-on, mais ces nouveaux voyageurs, issus des pays émergents ou des classes moyennes occidentales, auront-ils les moyens d’acquérir ces outils hyper sophistiqués indispensables pour participer à la révolution proposée ici ? On peut objectivement en douter, malheureusement…

Et au delà de ces premiers freins, j’ai l’impression que l’on peut aussi interroger cette démarche fondée essentiellement sur le progrès technologique au regard de l’état du monde et des tendances sociétales. À ce monde technologiquement abouti, capable de nous offrir des commodités nouvelles bien utiles, on peut effectivement opposer quelques questionnements forts, parmi lesquels :

  • L’hyper-personnalisation à outrance semble faire fi de la tendance « collaborative », pourtant elle-même née des possibilités infinies d’interactions entre les personnes proposées par l’hyper-information. 
  • La protection de la vie privée ne constitue-t-elle pas un défi majeur, voire monstrueux pour l’avenir de ces services fondés sur l’exploitation de tous les faits et gestes des personnes ? 
  • Le virtuel de plus en plus réel ne va-t-il pas atténuer le désir de partir découvrir un ailleurs désormais déjà familier ?

Oui bien sûr, je joue ici un peu les Cassandre à dessein… Mais imaginons un instant un avenir où les préoccupations éthiques autour du respect de la vie privée, des solidarités inter-personnelles, des inégalités économiques, etc. influeraient sur l’approche conceptuelle du progrès technologique. Cela conduirait à une toute autre projection concernant le voyage ! 

« L’avenir de Monsieur est devant lui, et il l’aura dans le dos chaque fois qu’il fera demi-tour. » disait Pierre DAC. Les quelques flops retentissants de ces dernières années que nous rappellent Ludovic et Jean-Luc à Pau ne sont-ils pas eux-même déjà quelques petits quarts de tours ? Alors approfondissons ces questions pour mieux les intégrer à la prospective et rester en phase avec nos clients.

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Paul FABING était directeur de la Mission Attractivité chez Alsace Destination Tourisme.  Architecte de formation, ancien consultant tourisme, chef du service Tourisme de la Région Alsace, directeur de RésOT-Alsace (Réseau des offices de tourisme), directeur du pôle Qualité de l'accueil à l'Agence d'Attractivité de l'Alsace (AAA), il occupe cette fonction depuis 2020. Entre autres missions, la Mission Attractivité gère et anime le système d’information touristique alsacien qui consolide l’ensemble des [...]
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