Par amour du Monde

Publié le 14 mars 2019
6 min

C’est par amour du Monde que j’ai choisi de faire des études de tourisme : sensibilité à la préservation et à la transmission du patrimoine historique, admiration pour les beaux espaces, goût de la découverte permanente, fascination par les autres cultures, etc…
Mon choix d’une carrière dans le tourisme, c’était il y a exactement 10 ans, après une année Erasmus passée à Grenade, confirmant mon amour pour les voyages et les échanges culturels et me confortant ainsi dans l’idée que le tourisme était ma vocation.
C’était le début des lignes low-cost, le monde était à portée de main.

Tout était au mieux dans le meilleur des mondes possible.

Puis, au cours de cette dernière décennie, j’ai commencé à entendre parler d’épuisement des ressources naturelles, de réchauffement climatique, de pollution… Ces thématiques m’ont beaucoup touchée, moi, amoureuse des richesses de la terre et de l’humanité dans sa diversité. Alors j’ai commencé, petit à petit, à changer mes habitudes de vie, à devenir “éco-responsable”.

Aujourd’hui, ce n’est pas sans culpabilité que j’avoue travailler “dans le tourisme”, ce secteur tant montré du doigt pour ses conséquences néfastes pour notre planète bleue.

Je reste toutefois convaincue des effets positifs de notre secteur d’activité, de toutes ses vertus qui m’ont tournée vers lui : créateur d’emploi, de richesses, permettant la reconversion des territoires en déclin, la dynamisation des territoires reculés, le repeuplement de villages abandonnés, la restauration et mise en valeur du patrimoine, l’aménagement d’infrastructures (transports, eau potable,…), créateur de lien social, contribuant à une meilleure connaissance de “l’autre”, diminution conséquente de la peur des autres peuples et du racisme, opportunité d’empowerment des femmes, et j’en passe.

Même si finalement la plupart des gens travaillent directement ou indirectement pour des secteurs d’activités polluants, il me semble important, à la fois en tant que touriste et professionnel du tourisme, de se poser des questions pour faire évoluer notre secteur vers le chemin de la durabilité. Il en va d’ailleurs de notre survie : nous sommes particulièrement dépendants des aléas climatiques et géopolitiques. Sécheresses, feux, inondations, tempêtes, ou même guerre du pétrole, sont donc des menaces sérieuses.

Le sujet revient régulièrement sur etourisme.info, car même s’il ne s’agit pas d’innovation “techno”, nous avons bel et bien besoin d’innover dans nos produits touristiques, dans notre aménagement touristique et dans notre consommation touristique, afin de solutionner ces problèmes émergents. C’est d’ailleurs l’un des sujets de la boule de cristal 2019.

Voici quelques points sur lesquels le tourisme est particulièrement critiqué. Je vous invite à réfléchir sur les moyens que nous avons pour prévenir ou réduire ces phénomènes, à la fois en tant que professionnels du tourisme et en tant que touristes.

Surtourisme et destruction du patrimoine

D’Angkor à l’île de Pâques en passant par Venise ou Barcelone, les dangers de la surfréquentation des sites touristiques sont de plus en plus pointés du doigt par les médias.

Venise
©francetvinfo.fr

Professionnels du tourisme :

Selon moi, la solution principale réside dans la diffusion des flux. Il en va de notre responsabilité de mettre en avant de nouveaux lieux, en travaillant tant sur la promotion que sur le développement de l’offre, afin d’éviter des concentrations en surnombre dans quelques lieux restreints, et de faire profiter d’autres lieux des vertus du tourisme.
D’ailleurs, même Airbnb commence à jouer le jeu avec la promotion des petits villages et de l’agritourisme.

Une autre piste : travailler à l’étalement de la saison touristique par le développement de l’offre de loisir et de l’offre événementielle. En visitant Saint-Cirq-Lapopie une belle soirée de février, j’ai aussi pensé qu’il est important de communiquer sur la magie des lieux célèbres aux heures et aux saisons où les visiteurs se raréfient.

Touristes :

“Notre problème,[…] c’est que la majeure partie des gens partagent les mêmes valeurs du tourisme : le ciel bleu, la mer chaude, le soleil…”


Philippe Violier
SOURCE : La Croix

A nous de faire des “concessions” sur le choix de notre destination de vacances, en privilégiant une mer moins chaude, un ciel moins bleu, ou tout simplement en sortant des clichés que les vacances sont forcément au bord de la mer.
Soyons inventifs, soyons pionniers, soyons uniques, il y a tant de lieux magnifiques à explorer. Mes plus beaux souvenirs de vacances sont d’ailleurs là où il n’y avait personne, au bord d’une petite rivière du Larzac ou sur les plages des îles reculées des Andaman.

Déplacements et consommation carbonne

« Un aller-retour Paris-New York envoie plus d’une tonne de gaz carbonique dans l’atmosphère par passager, soit autant qu’une année de chauffage« , « Un bateau de croisière de taille moyenne consomme jusqu’à 150 tonnes de fioul par jour, et émet autant de particules fines qu’un million de voitures« 

©aerogondo

Professionnels du tourisme :

Pourquoi pas mettre en avant votre offre d’itinérance douce ? Faites l’éloge de la lenteur.
De plus en plus de destinations touristiques font également le choix de valoriser le tourisme intra-territorial. N’oubliez pas que vos habitants sont vos premiers touristes !

Touristes :

Pour les inconditionnels de l’avion, je vous recommande cet article du Monde sur les gestes à adopter pour moins polluer en avion.
Je vous conseille également d’expérimenter les plaisirs du voyage lent ! Faites un tour au festival du Roc Castel pour trouver l’inspiration. Vous retrouverez peut-être alors ce sentiment de liberté que seul le voyage lent peut vous offrir.

Globalisation vs folklorisation

Le touriste veut être dépaysé, en visitant des lieux qui le changent de son ordinaire, mais paradoxalement, il a généralement besoin d’être rassuré avec des repères, avec un cadre connu dans la nourriture ou l’hébergement par exemple.
Le tourisme de masse a donc largement participé au développement des enseignes internationales ou des hébergements type hôtels-clubs, coupés des cultures locales.
A l’inverse, il entraîne la folklorisation de lieux ou de cultures, qui deviennent de réelles attractions. Je pense par exemple à certains villages ethniques chinois où les habitants sont devenus acteurs d’une mise en scène de leur vie quotidienne.

Cérémonie d'accueil JiDao
Cérémonie d’accueil dans le village ethnique de JiDao.
©circuitschine.com

Professionnels du tourisme :

Il me semble essentiel de pousser au maximum la consommation locale. Pour trouver l’inspiration, je vous recommande ce dossier sur l’innovation dans le tourisme de terroir.

Mobilisez vos habitants, encouragez les initiatives locales, valorisez ce qui fait la richesse de votre territoire.

Touristes :

Et si vous vous inspiriez d’Antoine de Maximy ?

Dégradation du milieu naturel

Malheureusement, même les visiteurs d’espaces verts ne sont pas toujours respectueux de la nature.

©nautiljon.com

Professionnels du tourisme :

Invitez vos touristes à nettoyer vos plages, à entretenir vos espaces naturels, ou à toute autre activité pour participer et sensibiliser vos visiteurs à l’entretien des richesses naturelles de votre destination.

Vous pouvez également, par le biais de campagnes décalées, sensibiliser vos visiteurs aux incivilités à ne pas commettre, à l’instar du Manuel de Savoir-Vivre à l’Usage du Voyageur Moderne de la RATP ou du mur peint en jaune à Lisbonne.

Touristes :

Etre touriste, c’est être coupé du temps et des lieux du quotidien. Les vacances sont la “recréation” de l’individu, qui a alors souvent tendance à oublier les normes et valeurs acquises. Alors même en vacances, n’oubliez pas les gestes responsables de votre vie quotidienne. Il n’y a pas de vacances pour la planète.

Pour finir, je vous invite à :

A nous de jouer 🙂

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Diplômée de l’ESTHUA de l'Université d'Angers en conduite de projets touristiques, Amélie Perrin a d'abord été chargée de promotion pour l'Agence Touristique de la Touraine Côté Sud à Loches. Elle est ensuite partie en Inde s'occuper d'une association humanitaire, et a vécu deux ans en Chine où elle était lectrice de français à la Faculté de Tourisme de l'Université de Ningbo. Après une expérience de directrice d'office de tourisme dans [...]
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