Le démon vs la raison : le dilemme du touriste, l’objet etouristique !

Publié le 31 mai 2012
2 min

J’ai lu il y a un certain temps le livre de Michel ONFRAY « Théorie du voyage « . Ce philosophe hors normes nous propose un éclairage décalé et décapant du voyage et subséquemment du phénomène touristique. 

Il détermine avec précision les ressorts qui nous font partir, qui nous portent ailleurs pour un temps donné.

Encore une fois n’écoutant que mon courage, je me suis mis à chercher dans ce foisonnement philosophique quelques idées utiles pour nos chers sites institutionnels touristiques.

Bien incapable de faire l’exégèse d’un travail aussi dense, je me suis concentré sur une phrase qui me semble pleine d’intérêt pour nous autres :

« Dans la multiplicité des possibles, le démon dit, reste pour la volonté à consentir. « (Michel ONFRAY )

J’en vois qui sourient… alors je re-précise qu’il s’agit de voyage, pas des rapports hommes/femmes (mais finalement, c’est sans doute assez vrai pour ce sujet là aussi…).

Michel ONFRAY nous démontre dans l’ouvrage que c’est d’abord l’émotion, l’imaginaire, l’envie, la réputation, la promesse du plaisir qui induisent la sélection du partant face à la multitude des destinations. Ensuite seulement, la raison analyse la faisabilité du voyage et conduit la prise de décision. 
On voit là finalement 2 phases cruciales et distinctes qui précèdent et déterminent le choix de la destination :  une phase « émotionnelle » et cognitive pour titiller « le démon », puis une phase « réaliste » pour organiser le voyage. Les deux sont indispensables.

Pour aller plus loin, et considérant Internet comme un média pertinent pour le choix d’une destination, l’objet de nos sites institutionnels de destination, l’objet etouristique doit impérativement viser la facilitation de l’accomplissement de ces 2 phases par le futur touriste. 

Et finalement, est-il pertinent de construire le site de destination autour du cycle du voyageur, l’avant, le pendant et l’après séjour ? Ne faudrait-il pas clairement séparer ces temps auxquels correspondent des besoins et des attentes différentes ? Et même s’interroger sur les outils de lecture à privilégier pour chaque temps ? 

Imaginons uns stratégie etouristique  avec :

  • un site de séduction, d’émotions, de « promesses », avec la possibilité de donner corps à une envie pour « faire consentir la volonté »… A priori, on imagine là un site pour grands écrans allant jusqu’à la réservation en ligne…
  • un site de séjour, avec tous les services utiles, la géolocalisation, la météo, les circuits de découvertes, les conseils affûtés et engagés de l’office de tourisme, les contacts humains, etc. L’outil à privilégier serait le smartphone, voire la tablette pour les riches 😉
  • un site de partage pour garder le contact, cultiver la passion, partager ses émotions et ses expériences… Cela ressemble plus ou moins à du réseautage social, non ?

Quel serait le désavantage de segmenter pour mieux répondre aux réalités des usages ? L’argent ? Même pas sûr, parce que nos « gros sites qui font tout » sont gourmands et nécessitent des prouesses pour garder une cohérence dans l’ergonomie…

Depuis les Grecs, la philosophie, même si elle paraît très nébuleuse, nous amène à nous interroger sur le sens, à remettre en cause nos modèles de pensée pour finalement s’appliquer à la vie quotidienne. Et bien pour le tourisme aussi, et voilà une conclusion plutôt réjouissante !

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Paul FABING était directeur de la Mission Attractivité chez Alsace Destination Tourisme.  Architecte de formation, ancien consultant tourisme, chef du service Tourisme de la Région Alsace, directeur de RésOT-Alsace (Réseau des offices de tourisme), directeur du pôle Qualité de l'accueil à l'Agence d'Attractivité de l'Alsace (AAA), il occupe cette fonction depuis 2020. Entre autres missions, la Mission Attractivité gère et anime le système d’information touristique alsacien qui consolide l’ensemble des [...]
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