3 étapes clés pour devenir une destination de tourisme durable

Publié le 8 novembre 2017
5 min

Je reviens juste d’Ajaccio où l’ATC (Agence du Tourisme de Corse) m’avait invité à animer les premières Journées du Tourisme Durable de Corse. C’était l’occasion de rappeler les éléments fondateurs qui font d’un territoire, une destination de tourisme durable.

Une semaine avant, je me rendais à Paris pour coordonner le Jury des premières Palmes du Tourisme Durable en ma qualité de Président des Acteurs du Tourisme Durable avec une dizaine d’experts du sujet afin de sélectionner les finalistes des 6 catégories : Territoires & Destinations, Tour-opérateurs, Hébergements, Loisirs, Informations et Mobilité. Si vous souhaitez voter pour la meilleure pratique, c’est par ici

Oui ! En cette Année internationale du tourisme durable pour le développement, proclamée par les Nations Unies, les initiatives se succèdent sur le thème. Pour rappel, le tourisme durable, ce n’est pas le fait de pratiquer du tourisme à vélo, de dormir dans un arbre ou de partir en Afrique pour faire du volontariat. Le tourisme durable, c’est simplement l’intégration des enjeux de développement durable par l’ensemble du secteur du tourisme. C’est pour cela qu’à travers les Palmes du Tourisme Durable, ce sont l’ensemble des métiers du tourisme qui sont touchés et on retrouve parmi les finalistes tous types d’acteurs, des petits, des plus représentatifs, des structures historiques, des start-ups touchant des formes variées de tourisme, que ce soit sur le tourisme d’aventure, culturel ou même urbain !

Mais alors, pour une destination, un OGD, par quel bout faut-il prendre la question pour transformer un territoire en destination de tourisme durable ? Voilà les 3 points essentiels selon moi :

1 – Porter une ambition politique du développement durable :

Tout commence par une vision, une ambition de la part des élus locaux d’un territoire. Intégrer des engagements en matière de développement durable dans le tourisme, ce n’est pas juste mettre du vert sur les brochures ou mettre à jour son PDIPR, il s’agit de construire avec tous les élus et toutes les parties prenantes du territoire une ambition commune et sincère pour tous. Pour intégrer dans les objectifs stratégiques de long terme d’un territoire (et non pas uniquement dans le tourisme) un équilibre entre les impacts économiques, sociaux et environnementaux, ça ne peut pas être porter uniquement par les techniciens d’un office de tourisme. Les élus doivent s’engager pour un projet de société et un projet de territoire dans lequel les enjeux de développement durable sont intégrés au plus haut niveau. Et ces objectifs doivent toujours rester en ligne de mire ! D’où l’intérêt demain d’intégrer dans les tableaux de bord touristiques non plus uniquement les aspects économiques mais également le bien-être des habitants (comme Copenhague nous l’a présenté aux #ET13), les circuits courts, la dépendance à certains acteurs internationaux, les impacts sur l’environnement, leur bilan carbone, etc.

 

Cette vision, c’est un peu l’ADN de la destination. Elle doit être inscrite, comprise et portée par toutes les parties prenantes du territoire. Et, de manière logique, elle devrait s’intégrer dans un plan de développement durable du territoire, transversale à tous les secteurs d’activités.

Ensuite, afin d’appliquer cette vision, il s’agit de faire évoluer en interne une politique de responsabilité sociétale, que ce soit au sein d’un office de tourisme, d’un CRT ou d’une autre administration publique. Le CRT Bretagne est par exemple labellisé Green Globe depuis quelques années déjà afin de montrer qu’ils balaient aussi devant leur porte avant de pousser leurs adhérents à s’engager. Ainsi, vous ne verrez plus de gobelets en plastique, de gaspillages de papier, etc. là-bas. Ca commence par là et ça continue en faisant par exemple évoluer les critères de sélection sur les appels d’offre, d’organiser des évènements neutre en carbone, etc.

Dans ce cadre, il existe des programmes comme Green Globe mais aussi le Passeport Vert ou Green Destinations qui suivent largement les Critères Mondiaux du Tourisme Durable.

 

2 – Engager les socio-professionnels dans cette cohérence d’engagements :

A partir du moment où cette stratégie est validée, il s’agit d’engager les socio-professionnels dans cette démarche globale. On ne parle pas encore de marketing. Il s’agit simplement de pousser les hébergeurs, les réceptifs, les prestataires d’activités ou de services, les restaurateurs à aller dans le sens d’un tourisme durable et de la vision assumée lors du 1er temps.

Bien sûr, pour cela, il faut de la confiance croisée entre les professionnels et l’organisation. Or, en partant sur une vision ambitieuse, une énergie positive et communicative se transmet auprès de l’ensemble des parties prenantes de la destination. Ce leadership est nécessaire. Puis, il est positif d’utiliser certains leviers afin de pousser les socio-professionnels à changer. Parfois, l’ADEME ou l’action publique peuvent soutenir les éco-rénovations dans les hébergements ou pour soutenir de nouveaux projets qui vont dans le sens du tourisme durable. C’est ainsi que des professionnels tendent alors à être certifiés sur l’un des programmes de tourisme durable en particulier Clé Verte ou Ecolabel Européen en France pour les hébergements.

Cette cohérence d’engagement est aussi nécessaire pour le visiteur. Si on lui vend l’image d’une destination engagée et qu’il retrouve des prestataires qui ne font aucun effort sur des démarches sociales ou environnementales, attention au retour de bâton sur Tripadvisor…

Ainsi, à travers ses travaux, on pourra favoriser l’accessibilité du tourisme pour tous, développer des offres de tourisme sans voiture, déployer l’engagement des restaurateurs sur les circuits courts, pousser les hébergements à réduire leurs consommations en énergie et en eau, etc.

 

3 – Impliquer les clients & assumer la promesse de tourisme durable :

Enfin, dernier point, il s’agit d’engager le client, à la fois en le faisant venir mais aussi en le transformant en ambassadeur. S’engager dans une démarche sincère de tourisme durable, c’est un excellent moyen de satisfaire le visiteur et de partager avec lui un engagement au service du bien commun. Les touristes vont alors se reconnaître plus largement dans la marque de destination présentée et en devenir un défenseur ! L’Islande en a fait son credo depuis l’explosion de la destination ces 2 dernières années. On a pu voir fleurir à la fois des vidéos pour sensibiliser et engager les visiteurs à travers une Iceland Academy sur Youtube, au ton engagé et décalé. Et dernièrement, ils ont lancé le Serment Islandais afin de pousser les visiteurs à protéger la destination en devenant un touriste responsable. C’est l’une des seules destinations qui a assumée clairement son positionnement de destination de tourisme durable ! Sur le long terme, cette stratégie ne peut être que gagnante surtout en utilisant un ton sympathique et non moralisateur. On peut également citer le Costa Rica qui, historiquement, s’est engagé dans une démarche nationale de tourisme durable à travers sa certification CST. Cette destination a su largement s’appuyer sur son image préservée pour accroître son attractivité !

Le CRT Bretagne en a aussi fait son cheval de bataille en choisissant dès le départ d’en faire une marque propre « Voyagez Responsable en Bretagne » avec un site dédié qui est à la fois utile pour sensibiliser le voyageur et pour présenter l’offre disponible sur le territoire breton.

Alors, pour finir cette Année internationale du Tourisme Durable pour le Développement, quid d’une véritable politique de développement durable du tourisme en France et dans toutes nos grandes régions ?!

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Hey! Moi, c'est Guillaume Cromer, je pilote ID-Tourism, cabinet d'ingénierie sur le marketing du tourisme. Historiquement, je suis bien impliqué sur les questions de tourisme durable mais depuis quelques temps, je m'intéresse beaucoup à la question de la prospective du tourisme pour bien comprendre comment vont évoluer les attentes des voyageurs et de quelle manière il va falloir adapter les organisations publiques et privées du tourisme. Hyper curieux et de [...]
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